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Par les villages

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“Au village sans prétention, j’ai mauvaise réputation.” Brassens

Comme tout microcosme, le village au cinéma est un lieu privilégié d’étude de l’âme humaine. La proximité qu’il impose fournit son lot d’intrigues et de romances, entre jalousie, pressions sociales et personnages hauts en couleurs. Une autre dynamique d’amour-haine est celle qui sous-tend la relation entre villages et métropoles : si les ruraux rêvent souvent la ville, les citadins fantasment la campagne. Une sélection qui vous emportera de village en village pour explorer des territoires très variés, du Berry au Bengale, de l'Italie au nord de l'Angleterre…

Une silhouette toute en souplesse va de maison en maison sur sa bicyclette, dessinant la topologie du village berrichon. Cette silhouette longiligne, c’est celle inimitable de Jacques Tati en facteur fier de son métier, qui s’offusque quand il découvre à la fête du village un film sur les moyens modernes employés par ses homologues américains. Grand prix du scénario à la Mostra de Venise en 1949, Jour de fête sonde déjà l’un des thèmes chers à Tati : le rapport entre tradition et modernité.

Un autre jeune postier et sa mère (Lucas Belvaux et Stéphane Audran) sont la cible des magouilles des notables de leur bourg dans Poulet au vinaigre (1985). Chacun lorgne en effet sur leur propriété, jusqu’à ce qu’un meurtre vienne noircir l’affaire. L’inspecteur Lavardin (inoubliable Jean Poiret) est alors mandaté pour l’enquête, donnant une saveur toute particulière à l’un des films noirs les plus régalants de Claude Chabrol.

La proximité laissant peu de place à l’intimité, le poids des normes sociales ou religieuses peut se faire lourdement sentir, à l’instar du village écossais de Breaking the Waves. Elles pèsent sur Bess, jeune femme au cœur pur, prête à tous les sacrifices par amour pour son époux récemment paraplégique. Premier film de Lars Von Trier à atteindre la reconnaissance internationale (Grand prix à Cannes 1996), ce mélodrame est porté par la grâce de deux actrices (Emily Watson et Katrin Cartlidge) et une mise en scène chahutée — entre format scope et caméra à l’épaule – où le visage de Bess devient un paysage battu par les vents.

D’autres personnages féminins embrassent plus frontalement leur rébellion vis-à-vis de leurs voisins, quitte à assumer leur aura de “sorcières”. La Fiancée du pirate (Nelly Kaplan, 1969) est une mise à nu de l’hypocrisie ambiante, portée par Bernadette Lafont dans un rôle de vengeresse n’ayant pas sa langue dans sa poche. Le ton très libre, si ce n’est libertin, du film en fait un manifeste, bercé par “Moi, je me balance”, composé par Moustaki pour le film et interprété par Barbara.

On retrouve une autre figure de femme tenue à l’écart, parce qu’accusée de sorcellerie (la matriarche Sana), dans Yaaba du cinéaste burkinabè Idrissa Ouédraogo. Récit d’apprentissage sur le passage de l’enfance à l’âge adulte, il narre l’amitié qui se noue entre Sana et Bila, un petit garçon de dix ans. Prix de la Critique à Cannes en 1989, le film, doux et solaire, est à la fois une invitation au voyage et un document rare sur la vie de ce village du Sahel.

La misère pousse parfois à quitter la campagne pour la ville, comme dans la “Trilogie d’Apu” de Satyajit Ray. Le premier volet, La Complainte du sentier (1955) nous donne lui aussi à voir par les yeux d’un enfant la vie d’un village, ici bengali. Après avoir été l’assistant de Renoir sur Le Fleuve, Ray signe un premier film éblouissant, entre regard proche du néoréalisme italien et rythme souverain des maîtres japonais. « Ne jamais avoir vu un film de Satyajit Ray, c’est comme ne jamais avoir vu le soleil » disait Akira Kurosawa dont La Complainte du sentier était l’un des films de chevet.

L’aigre-doux Les Merveilles d’Alice Rohrwacher (Grand Prix à Cannes en 2014) se concentre sur la vie d’une famille d’apiculteurs. Malgré les difficultés, la douceur de l’utopie d’une vie en communauté s’incarne dans une joyeuse pagaille quotidienne. Mais l’ainée rêve d’une normalité qui puise sa source, paradoxalement, dans une émission de téléréalité semblant concrétiser ses rêves…

80 ans avant Les Merveilles, King Vidor s’intéressait déjà aux collectivités agricoles, alors menacées par les répercussions de la grande dépression. Considéré comme le premier film indépendant américain, soutenu par Chaplin via United Artists, et dialogué par Mankiewicz, Notre pain quotidien (1934) n’est pas sans évoquer la poésie engagée du cinéma soviétique, où l’émotion et la puissance des images servent un discours en faveur de la solidarité d’une coopérative agricole. 

L’influence des grands cinéastes soviétiques n’est jamais loin chez Abderrahmane Sissako qui a fait ses études de cinéma à Moscou. Tourné en Mauritanie, Timbuktu (2014) met en scène l’occupation jihadiste de la ville malienne. Leur mise en place de la charia s’étend peu à peu aux alentours, persécutant les habitants d’un village de la région. Composé comme une fable, le film d’une grande beauté formelle célèbre les puissances de la vie tout en construisant un portrait complexe de la figure du persécuteur. Timbuktu reçoit sept César en 2015, dont celui du Meilleur film.

Comédie noire - et film culte - signée Bruce Robinson, Withnail et moi (1987) fait le portrait de deux comédiens londoniens en galère, décidant de se rendre quelque temps à la campagne chez l’oncle de l’un deux. Ils déchantent rapidement quand ils découvrent que les conditions de vie locales ne correspondent pas au petit paradis qu’ils s’étaient imaginé…

Ce n’est pas un triangle, ni même un quatuor amoureux, mais un véritable faisceau d’intrigues matrimoniales qui se tissent dans le paisible village de Sagliena. Comédie de mœurs flirtant avec le vaudeville, Pain, Amour et Fantaisie suit les déboires sentimentaux d’un officier (Vittorio De Sica) tout juste arrivé au village et ne doutant pas de son pouvoir de séduction.


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