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Deux sous d'espoir de Renato Castellani

Deux sous d'espoir de Renato Castellani

À mi-chemin entre le néoréalisme et la comédie à l'italienne : Deux sous d'espoir

 

Signé Renato Castellani, Deux sous d’espoir (1952) inaugure, dans le cinéma italien, ce que l’on désignera sous le terme plutôt péjoratif de néo-réalisme « rose ». Film de croisements et de paradoxes, il marque la transition du néo-réalisme de l’après-guerre vers la comédie à l’italienne des années 60. Déprécié à sa sortie par la critique de son pays, que la légèreté de ton dérange, il remporte néanmoins le Grand Prix à Cannes et rencontre un franc succès public. 

À première vision, Deux sous d’espoir semble réunir toutes les caractéristiques nécessaires pour s’inscrire dans le mouvement néo-réaliste : Renato Castellani lui-même, de par son parcours, est proche des autres cinéastes néo-réalistes ; le film est tourné aux alentours de Naples en décors naturels avec des acteurs non-professionnels ; et les difficultés socio-économiques du Mezzogiorno — le sud de la botte — sont au cœur du récit, soulignées par une voix off décrivant, dans un style quasi documentaire, les conditions misérables des travailleurs. Le film respecte donc l’équilibre fragile du néo-réalisme tel que le définit André Bazin : la soumission du récit au réel.

Aux yeux de la critique de l’époque cependant, Deux sous d’espoir adopte une tonalité insouciante, laissant trop de place à la romance, voire à l’optimisme, et mettant l’accent davantage sur le drame individuel que sur le drame collectif. Dans un contexte d’affrontement politique aigu se jouant aussi dans les salles obscures, ces points indéniables attisent rapidement le débat. Le succès populaire du film, loin d’être mis à son crédit, est lu comme une preuve de sa complaisance et de son manque d’engagement dans sa représentation des problématiques sociales, au risque de freiner la tant attendue prise de conscience collective. Pourtant, la multitude de personnages secondaires ainsi que les nombreux petits métiers qu’enchaîne Antonio, dessinent une peinture variée et peu enviable des conditions de vie locales.

La légèreté de ton du film, fait d’humour et d’espoir, l’éloigne effectivement des canons néo-réaliste, et aura une influence sur certains cinéastes de la Nouvelle Vague, en premier lieu Jacques Rozier, et leur propre portrait de la jeunesse. Aujourd’hui, à grande distance des polémiques de l’époque, la force de Deux sous d’espoir réside avant tout du côté de la complexité des personnages et la restitution sensible de leurs contradictions. Le film de Castellani propose ainsi une autre représentation de l’éveil politique, qui se fait davantage à travers l’expérience des émotions que par un apprentissage théorique. C’est emportés par l’amour impossible qui les lient que Carmela et Antonio trouvent la force de s’élever contre les normes sociales qui les étouffent, produisant in fine un élan collectif de soutien aux aspirations portées par les deux jeunes amoureux.

Deux sous d'espoir est dans l'abonnement jusqu'au 10 juillet 2025 dans la sélection "Récits de jeunesse".


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